Jean-Paul Gaillard
in revue Médecine & Hygiène, Genève, n° 2330, 17 janvier 2001
Résumé : 40 à 60 % de la clientèle du médecin généraliste est mal cadrée par modèle organiciste. Beaucoup de ces patients « mal cadrés » souffrent de complications de suite de deuil. L'auteur propose à l'usage des médecins généralistes un outil simple d'accompagnement et de dynamisation du processus de deuil, évitant qu'il ne se mute en dépression ou en troubles psychosomatiques divers. Cet outil permet au praticien de conserver le contrôle de l'entretien et d'orienter utilement son patient vers une issue favorable de son deuil.
Mots clés : processus de deuil - suite de deuil - récursivité - bouclage - linéarisation - chronicisation - outil - choc - dénégation - colère - marchandage - désespoir - sagesse devant la mortalité - contrôle de l'entretien.
Le temps du deuil, bien qu'il fasse l'objet de commentaires nombreux et de travaux multiples, se trouve le plus souvent, dans la clinique médicale quotidienne, ravalé au registre vague de la dépression et, à ce titre, traité sans autre forme de procès à l'aide de cocktails comprenant, au choix du praticien et à la mesure de l'angoisse qu'il éprouve face à l'endeuillé, benzodiazépines, thymo-analeptiques ou neuroleptiques.
Les chiffres les plus modestes indiquent que 40 à 60 % des affections présentées par les patients au cabinet du médecin généraliste (Gaillard 1995), ne relèvent pas de la nosographie organiciste bien que relevant de la médecine générale (Gaillard 1994) : ils présentent des troubles évoluant entre le fonctionnel, le psychosomatique et le psychiatrique. 20 % d'entre eux sont étiquetés « dépression » et soignés comme tels. Parmi ces 40 à 60 % de patients non conformes, on trouve une quantité non négligeable de « suites de deuil », souffrant de multiples troubles, allant de fonctionnel pur à organique grave. Il n'est donc pas inutile de se pencher sur cette question : nous nous proposons de le faire autour d'un outil de maniement simple et efficace, avec pour objectif d'éviter une chronicisation du processus de deuil, ainsi que les suites morbides qui s'ensuivent trop fréquemment.